En copropriété, il y a une obsession chronique : la réduction des charges de copropriété. C’est si répandu comme pratique que cela semble maintenant s’inscrire dans la culture sociétale, dans l’ADN d’une majorité de copropriétaires. Puisqu’il faut un minimum d’entretien et de propreté, l’établissement d’un budget devient donc très fréquemment un exercice pénible auquel les administrateurs doivent s’astreindre annuellement.
Un cercle vicieux qui saute aux yeux
Systématiquement, tenter de réduire les charges de copropriété est néfaste. Cela complexifie la gestion et fausse les perceptions des ressources nécessaires à l’exploitation d’un immeuble en copropriété. En bout de piste, cela engendre un climat d’insatisfaction et de déception des copropriétaires. La présence d’un cercle vicieux est incontestable. Il est impossible de gérer convenablement un immeuble, et de l’entretenir, sans avoir accès aux ressources financières minimalement nécessaires.
Toujours trop haut, rarement trop bas
Dans un tel contexte, qu’arrive-t-il quand des hausses importantes des charges de copropriété surviennent, notamment à la suite de la réception d’une étude du fonds de prévoyance ? De façon quasi universelle, la réaction est la même : « nos charges de copropriété ont augmenté radicalement, pourquoi n’avons-nous pas de meilleurs services ? ». Peu importe l’importance et les enjeux, aux yeux du copropriétaire moyen, les charges de copropriétés sont toujours trop élevées, sinon faramineuses, voire pharaoniques !
Les services sont invisibles
Voilà bien le hic. Quelle est la valeur des services rendus ? Il semble bien que le copropriétaire moyen n’ait pas les connaissances requises – ou l’intérêt – pour l’évaluer correctement. Le constat est perturbant, pour dire le moindre. À sa décharge, plusieurs activités ou services sont littéralement invisibles : réunions du conseil d’administration, procès-verbaux, tenue des registres techniques, tenue de livres et préparation des états financiers intérimaires, avis de cotisation, avis de convocation et gestion des procurations, organisation de l’assemblée générale annuelle, collecte des charges de copropriété et dépôts de chèques, recouvrement, rencontre de fournisseurs et préparation de devis, lecture de documentation technique, échanges de courriels et communications aux copropriétaires, négociation de contrats, supervision de travaux, etc.
La réaction du gestionnaire
La liste des activités à mettre en œuvre est longue et les ressources étant manquantes, le travail du gestionnaire professionnel est difficile et relève parfois de l’exploit. Pour bien faire son travail, le gestionnaire de copropriété doit livrer des services qui excèdent grandement le prix facturé. Le marché de la copropriété étant ce qu’il est, les gestionnaires semblent avoir consenti au fil du temps à réduire leurs honoraires afin de se plier à la perception économique de la clientèle. D’autres semblent tout simplement opter pour une réduction des services rendus, car le temps réel à consacrer à la liste (non exhaustive) d’activités énumérées ci-dessus est si considérable que, pour faire adéquatement son travail à l’intérieur du budget, le gestionnaire devrait travailler nettement en deçà de sa véritable valeur. À ceci, il faut ajouter la responsabilité de jouer le rôle de policier, naturellement mal aimé quand il fait bien son travail car il fait respecter la déclaration de copropriété, à la lettre : avis d’infraction, pénalités, intérêts sur paiements retardataires, etc.
Le pot et les fleurs
Étrangement, l’ajout d’un pot de fleur à l’entrée, l’achat d’une nouvelle chaise sur la terrasse, ou le remplacement d’une ampoule donne aux copropriétaires une bien plus grande satisfaction que le fait d’avoir un fonds de prévoyance bien pourvu ou des registres de copropriété bien tenus. Les perceptions sont souvent biaisées, rappelant combien notre société se doit de développer sa littératie financière, et tous les intervenants de l’industrie de la copropriété devraient participer à ce changement de perception nécessaire pour maintenir un parc immobilier de qualité pour les générations futures. Ce changement est aussi nécessaire pour attirer des gens de qualité pour s’occuper de ce qui constitue souvent notre actif le plus précieux.
Faire les choses correctement, c’est payant!
Heureusement, il existe des conseils d’administration qui ont une vision à long terme et comprennent parfaitement les besoins de leur immeuble et les obligations financières requises, incluant l’importance de cotiser adéquatement au fonds de prévoyance pour conserver leur immeuble et ainsi maintenir sa valeur. Établir un budget réaliste qui permet d’entretenir convenablement l’immeuble et d’y maintenir de saines pratiques de gestion assurent un rendement supérieur au marché. Démarquez-vous-en ce sens et vous serez récompensés en termes de valeur et de rendement de votre actif.
Publié le 15 janvier 2018 par l’Ordre des administrateurs agrées du Québec.